La sanction de nullité a priori applicable dans pareille hypothèse ne manque pas de poser question, dans la mesure où, mettant un terme au contrat, elle aboutit à obliger le locataire à quitter les lieux et prive ainsi ce dernier de toute protection, alors que le manquement constaté incombe au bailleur qui a mis en location un bien non conforme.
L’article 5.57 du Code civil promulgué par la loi du 28 avril 2022 portant le livre 5 « Les obligations » du Code civil ne manque pas d’intérêt en la matière. Il dispose en effet : « un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. Toutefois, le contrat demeure valable dans les cas prévus par la loi ou lorsqu’il résulte des circonstances que la sanction de la nullité ne serait manifestement pas appropriée, eu égard au but de la règle violée ».
Cette disposition, dont l’entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2023, s’inscrit dans le droit fil d’évolutions législatives récentes, au rang desquelles on peut identifier l’article 219, §3 du Code bruxellois du logement, mais également de certaines décisions de jurisprudence soucieuses d’éviter les effets pervers découlant d’une nullité absolue du bail en considérant que le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation quant à la sanction à adopter.
Ainsi, la Cour de cassation a, dans son arrêt du 7 novembre 2019, admis que la sanction du non-respect d’une règle d’ordre public doit contribuer à la réalisation de l’objectif de la règle enfreinte et qu’il est donc loisible au juge de personnaliser cette sanction afin qu’elle soit adaptée aux circonstances spécifiques de la cause.
Plus récemment, notre Cour suprême a par ailleurs considéré, dans un arrêt du 6 février 2022, que le moyen selon lequel « il découle du caractère d’ordre public des normes de qualité du logement prévues par le code du logement flamand, tel qu’applicable en l’espèce, que le juge, s’il constate que le bien loué ne satisfaisait pas à ces normes au début de la période de location, est obligé de constater d’office la nullité absolue du bail parce que l’objet ou la cause du bail est contraire à l’ordre public, et que le locataire n’a plus le droit d’opter pour le régime de sanction de l’article 2, paragraphe 1, de la loi sur le bail de résidence principale en exigeant que le bailleur effectue les travaux nécessaires ou en demandant la résiliation du contrat, est fondé sur une erreur de droit ».