La tolérance fait indéniablement partie des vertus inhérentes à et nécessaires pour la vie en société. Si besoin en était, la théorie des troubles de voisinage vient d’ailleurs le confirmer comme un reflet dans un miroir. Développée à partir de deux arrêts emblématiques de la cour de cassation, elle vise à préserver l’équilibre entre deux fonds voisins en permettant à la victime de nuisances excessives de réclamer la réparation de son préjudice sans avoir à établir l’existence d’une faute dans le chef du propriétaire, usufruitier ou locataire voisin.
L’objectif de l’action en réparation de troubles de voisinage est d’obtenir une compensation en nature ou par le versement d’une somme d’argent plutôt qu’une réparation intégrale du déséquilibre subi en raison du comportement ou de l’inaction du titulaire du droit de jouissance.
Il était déjà admis que le délai de prescription applicable à cette action est celui qui concerne les actions extracontractuelles, déposé à l’article 2262bis, §1, alinéa 2 du Code civil, à savoir un délai de cinq ans « à partir du jour qui suit celui où la personne lésée a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l’identité de la personne responsable ».
Dans un arrêt du 29 mai 2020, la Cour de cassation a été amenée à rejeter un pourvoi introduit à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles qui avait admis que « dans la mesure où le fait générateur du dommage dont (la défenderesse) se plaint est continu et génère chaque fois de nouvelles nuisances sonores, il y a lieu d’admettre qu’un nouveau délai de prescription prend cours chaque fois (qu’elle) prend connaissance d’un nouveau bruit ».
En l’espèce, les troubles trouvant leur origine dans une situation existante depuis 2006 n’avaient fait l’objet d’une action judiciaire que le 27 novembre 2013. Cela n’avait pas empêché la Cour d’appel de Bruxelles de décider que la demande « visant à faire réaliser les travaux nécessaires pour mettre un terme aux troubles n’est pas prescrite ». Notre Cour suprême confirme l’analyse.