La loi du 18 juin 2018 « portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges » entrera en vigueur le 1er janvier 2019, sauf anticipation – fort peu probable – par Arrêté royal et sous réserve de certaines de ses dispositions applicables depuis le 12 juillet 2018.
Les nouvelles dispositions légales, modifiant ou complétant pour l’essentiel le Code judiciaire, ont un triple objectif : faciliter ou promouvoir le recours aux modes alternatifs de résolution des conflits, adapter le régime en vigueur en matière de médiation et, enfin, réglementer un nouveau mode de résolution des conflits, le « droit collaboratif ».
Afin d’inciter les justiciables à recourir à un mode amiable de résolution des conflits, le législateur met à la fois les avocats et les huissiers à contribution, les premiers, déjà soumis déontologiquement à pareille obligation depuis plusieurs années, devant informer leurs clients dans ce domaine et, dans la mesure du possible, favoriser la résolution amiable des conflits (article 444 CJ), les seconds étant soumis à une obligation similaire d’information vis-à-vis des justiciables qu’ils sont amenés à rencontrer (article 519, § 4 CJ).
Toujours afin de favoriser le recours à un mode amiable de résolution des conflits, le juge est doté de pouvoirs particuliers – que certains n’hésitaient pas à déjà exercer par le passé – lors de l’introduction d’une affaire en justice. Il peut ordonner la comparution personnelle des parties, s’informer sur la manière dont une solution amiable a été jusques là recherchée, informer les parties, voire encore remettre l’affaire à un mois maximum pour permettre aux parties d’envisager un éventuel recours à un règlement amiable de leur conflit (article 730 CJ).
Dans le domaine, déjà réglementé depuis la loi du 21 février 2005, de la médiation, le législateur apporte certaines retouches à la législation existante et tente de clarifier certaines questions qui restaient ouvertes.
Si diverses des adaptations de la septième partie du Code judiciaire, réservée à ce mode particulier de résolution des conflits, n’ont guère de répercussion directes sur le justiciable lui-même (l’on songera par exemple à la modification de la composition de la Commission fédérale de médiation ou à l’accroissement de ses missions, au renforcement de la formation des médiateurs agréés ou encore à la modernisation et l’élargissement des sanctions disciplinaires que peuvent encourir ces derniers), trois modifications doivent spécialement attirer l’attention de celui-ci.
En premier lieu, le législateur fait désormais choix de définir la médiation en tant que « processus confidentiel et structuré de concertation volontaire entre parties en conflit qui se déroule avec le concours d’un tiers indépendant, neutre et impartial qui facilite la communication et tente de conduire les parties à élaborer elles-mêmes une solution » (article 1723/1 CJ). Si l’ossature de la médiation, reposant tout à la fois sur le recours à un tiers médiateur et la confidentialité dans le but de trouver une solution amiable, n’est pas modifiée, la médiation exclusivement « facilitative », interdisant au médiateur de formuler un avis quelconque, semble devenir ainsi la seule et unique expression de la médiation réglementée, à l’exclusion de toute médiation « évaluative ».
En deuxième lieu, la loi renforce nettement les pouvoirs du juge en matière de médiation judiciaire.
Ainsi – et tel est sans doute pour le justiciable le caractère le plus marquant de la réforme – le juge peut désormais imposer le recours à la médiation sauf opposition de toutes les parties (article 1734, § 1er CJ) lors même que la médiation supposait jusqu’ici à tout le moins l’accord de toutes les parties. Les observateurs les moins critiques ne manqueront pas de s’interroger sur l’adéquation de cette modification au regard d’une définition de la médiation mettant en exergue le caractère volontaire du processus. Certes, s’il faut participer, encore n’est-il pas obligatoire d’aboutir !
D’autre part, à défaut d’accord entre parties quant au choix du médiateur, le juge reçoit le pouvoir de le désigner lui-même (article 1734, § 1er/1, alinéa 2 CJ) alors que jusqu’ici les parties devaient obligatoirement s’accorder à cet égard. Seul toutefois un médiateur agréé peut être choisi (article 1734, § 1er/1, 1er alinéa CJ) que le médiateur soit proposé conjointement par les parties ou désigné par le juge.
En troisième lieu et précisément concernant les médiateurs agréés, ceux voient désormais ce titre protégé (articles 1726, § 4 CJ et 227 quater CP), ce qui permet une plus grande transparence vis-à-vis du justiciable.
Enfin la loi réglemente un nouveau mode amiable de résolution des conflits : le droit collaboratif auquel est réservée la 8ème partie du Code judiciaire.
Ce processus, déjà pratiqué et structuré par le barreau en dehors de toute disposition légale, suppose une négociation sans présence d’un quelconque tiers facilitateur ou conciliateur. Il implique uniquement les parties et leurs avocats respectifs, lesquels reçoivent un mandat « exclusif et restreint d’assistance et de conseil en vue d’aboutir à un accord amiable » (article 1738 CJ). Autrement dit, l’avocat collaboratif, qui doit être spécifiquement formé à cette pratique, doit se retirer du dossier dans l’hypothèse où aucun accord n’interviendrait.
Il fait l’objet des articles 1738 à 1747 nouveaux du Code judiciaire, lesquels s’inspirent de diverses des règles existant en matière de médiation, si ce n’est que le juge ne peut ordonner le recours à ce processus qu’à la demande conjointe des parties et que l’accord éventuel n’est soumis à aucun régime d’homologation judiciaire.